Obligation de rester connecté même pendant les congés : le courrier électronique ne dort jamais

A présent, le courrier électronique constitue l'un des moyens de communication les plus courants, notamment dans le cadre des entreprises. Le courriel devient au fur et à mesure la nouvelle boîte aux lettres qu’il convient de consulter quotidiennement — même pendant les congés. La Cour suprême tchèque, par un arrêt récent, est venue confirmer ce qui n'était jusqu'alors qu'une hypothèse. A quel moment précis le courrier électronique est-il réputé avoir été délivré et pourquoi ce moment « M » est-il si important ? C’est à partir de ce moment que commencent à courir les délais légaux ou contractuels qu’il convient de surveiller attentivement pour éviter toute forclusion. Nous analysons ci-après les questions pratiques relatives à la notification.

Quel était le litige en cause ?

La Cour suprême a clarifié certaines zones d’ombre relatives à la signification électronique. Le litige concernait un membre du conseil d’administration d’une société, agissant comme demandeur, qui contestait la notification de la cessation de ses fonctions. Cette notification lui avait été envoyée par courrier électronique alors qu’il était en congé.
Le moment exact de la réception de cet e-mail était crucial pour déterminer le montant de l’indemnité de départ : si la notification avait été communiquée tardivement, comme le soutenait le demandeur, celui-ci aurait eu droit à une indemnité plus élevée.

Le cadre légal de la signification

a) Le moment de la réception

Le moment décisif de la réception est celui où le message parvient dans la sphère de disposition du destinataire(c’est-à-dire dans sa boîte aux lettres physique ou boîte de réception électronique), sous réserve que celui-ci ait la possibilité effective d’en prendre connaissance.
Cette possibilité se mesure à deux critères : le moment où le destinataire aurait pu prendre connaissance du message, et le lieu de réception habituel.
Par exemple, si le courrier est déposé en pleine nuit ou à un moment où le destinataire est au travail, il ne sera considéré comme « délivré » qu’au moment où il aurait pu raisonnablement le lire (le lendemain matin au réveil, à son retour du travail, etc.).
De même, si un avis de dépôt est laissé par le facteur, la réception n’est pas réputée avoir eu lieu à la lecture de cet avis, mais au début des heures d'ouverture du bureau de poste le jour ouvrable suivant.

Quant au lieu habituel, un courrier déposé dans la boîte aux lettres d’une résidence secondaire où le destinataire ne réside pas habituellement ne sera pas considéré comme valablement réceptionné.

À noter que la réception ne dépend pas de la volonté effective du destinataire de lire le message : il suffit que la possibilité matérielle de le faire existe.
Si le destinataire fait obstacle lui-même à la réception, le courrier est réputé avoir été dûment délivré.

Cependant, il convient de rester attentif dans les cas où une adresse spécifique de réception a été convenue : dans ce cas, la notification est valable indépendamment de la présence effective du destinataire (sauf circonstances exceptionnelles telles qu'une hospitalisation imprévue).

En cas de litige, c’est à l’expéditeur de prouver que le courrier est parvenu dans la sphère de disposition du destinataire.

b) Les modes de signification

Boîte aux lettres physique

Un courrier est considéré comme valablement signifié dès son dépôt dans la boîte aux lettres de l'adresse convenue ou de la résidence habituelle du destinataire.
Cependant, si l'intéressé est dans l'impossibilité absolue de récupérer son courrier (par exemple en cas d’hospitalisation ou de décès), la réception n’est pas réalisée.

En cas d’envoi par un opérateur de service postaux autorisé, une présomption légale prévoit que le courrier est réputé parvenu au destinataire au troisième jour ouvrable suivant l’expédition. Il est possible de consulter la liste des opérateurs de services postaux sur le site web de du Bureau tchèque des télécommunications, à l'adresse http://www.ctu.cz. Cette présomption peut néanmoins être réfutée en prouvant que l’envoi n’a pas eu lieu, a été envoyé à une mauvaise adresse, ou que des circonstances majeures empêchaient la réception.

Dans les relations de travail, la loi impose de privilégier une remise en main propre sur le lieu de travail avant d'envisager un envoi par poste.

A quel moment intervient la fiction de la notification, souvent redoutée ? Lorsque l'on communique avec l'administration publique, la signification se fait en général en main propre. En cas de non remise d'un document (le destinataire refuse le colis, est hospitalisé, etc.), le colis est déposé auprès de l'autorité administrative qui l'a délivré, le bureau municipal ou la poste. Une fois le courrier déposé, le destinataire est informé qu'il doit recueillir cet acte dans un délai de dix jours. A l'expiration de ce délai, le courrier est en principe déposé dans la boîte aux lettres et la fiction de notification est établie. En vertu du code de procédure administrative, l'acte de notification est signifié le dixième jour suivant la notification au destinataire. L'objectif est d'éviter de « faire le mort ». Toutefois, si le destinataire prouve son absence ou une raison sérieuse de ne pas avoir reçu le courrier, il peut demander une déclaration de nullité de la prétendue notification.

Courrier électronique
La réception d’un e-mail n’est pas conditionnée à son ouverture effective ni même à la connexion au service de messagerie. Les règles relatives au moment de réception sont similaires à celles applicables au courrier postal.

C’est dans ce contexte que la Cour suprême a jugé que le fait d’être en congé ne dispense pas de l’obligation de consulter ses courriels. L’absence prévue, telle que des vacances, n’est pas une circonstance permettant de repousser la date de réception.

Dans les relations de travail, pour qu’une communication électronique puisse produire des effets juridiques, trois conditions doivent être réunies :

  • Le salarié doit avoir donné son consentement écrit et avoir été informé des conséquences de cette forme de communication,
  • Il doit avoir communiqué une adresse électronique personnelle qui n’est pas sous le contrôle de l’employeur(donc pas d’adresse professionnelle ou intranet),
  • Le message envoyé doit être signé par une signature électronique qualifiée.

Le message est considéré comme réceptionné le jour où le salarié en accuse réception, ou, à défaut, le quinzième jour suivant l’envoi.

 « Boîte de données » (datová schránka)

Si le destinataire dispose d’une boîte de données officielle, les messages qui y sont envoyés sont réputés réceptionnés à l’issue d’un délai de dix jours, même sans consultation effective.

En guise de conclusion

A la lumière de la décision de la Cour suprême, il est indispensable de veiller à consulter sa boîte de réception électronique, y compris durant les congés.
Bien que la décision concerne les courriels, le raisonnement est transposable au courrier postal. Ainsi, il est vivement recommandé de charger une personne pour surveiller votre courrier pendant votre absence et malgré le but même du congé, de rester vigilant et de consulter également vos e-mails.